Le Tribunal Administratif de Châlons-en-Champagne vient de se pencher pour le huitième fois sur le sort de Vincent Lambert à l’occasion d’une audience très semblable à celles qui l’ont précédées. Vincent Lambert est en état neurovégétatif depuis un accident de la route en 2008. Il fait l’objet d’une procédure collégiale d’arrêt des soins telle qu’elle est prévue par la loi Leonetti-Clayes sur la fin de vie. Son épouse Rachel a fini par s’y résoudre en 2013 mais ses parents, dont sa mère présente à l’audience, ne l’acceptent pas.
Les plus hautes instances judiciaires ont déjà statué sur le cas de Vincent Lambert. Le Conseil d’Etat, la Cour Européenne ont confirmé la légalité de la procédure d’arrêt des soins. Mais elle n’a jamais été conduite à son terme parce que les parents refusent farouchement que la vie de leur fils soit interrompue. La procédure qu’ils contestent aujourd’hui est la quatrième du genre. Elle est engagée cette fois par le Docteur Vincent Sanchez, comme l’avaient fait avant lui deux autres patrons du service où Vincent Lambert est hospitalisé au CHU de Reims. Tout a donc déjà été dit, ou presque, dans le débat qui fait rage depuis cinq ans autour de la fin de vie de cet homme de 42 ans. Devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, les deux conseils des parents, ont une fois encore contesté la qualité des expertises rendues par un troisième collège d’experts Il conclut, comme tous les éminents spécialistes qui les ont précédés, à l’irréversibilité de l’état de Vincent Lambert. Les avocats ont par ailleurs porté un jugement particulièrement sévère sur le Docteur Sanchez qui, selon Maître Paillot, « ne connaît rien à ces patients cérébrolésés. » Ce qui justifierait le transfert de Vincent Lambert dans un service spécialisé, même si cette demande a déjà été jugée et rejetée. Ces mêmes avocats viennent d’être déboutés d’une requête en « suspicion légitime » dirigée cette fois contre le Président du Tribunal Administratif. « C’est la première fois en vingt ans, a commenté Olivier Nizet, qu’on remet ma probité en cause. » Inébranlables, les avocats ont demandé une nouvelle expertise, parce que « l’amélioration de la déglutition de Vincent est encore possible » selon Maître Triomphe qui ajoute que l’alimentation et l’hydratation par sonde gastrique ne constitue pas un acharnement thérapeutique. Les derniers experts l’ont d’ailleurs fait valoir dans leur rapport, ce qui voudrait dire que ce dossier ne s’inscrit pas dans le cadre de la loi française.
« Il y a pourtant bien obstination déraisonnable », répond l’avocate de Rachel Lambert, « parce que ces soins maintiennent Vincent Lambert artificiellement en vie. Le Conseil d’Etat a aussi tranché sur ce point » rappelle encore Sarah Nourdin. Elle s’indigne par ailleurs d’une vidéo diffusée sans l’accord de Vincent Lambert. « On le voit déglutir au risque de fausses routes susceptibles, selon les experts, de provoquer des infections dont les traces sont visibles sur les radiographies pulmonaires. » Gérard Chemla est l’avocat d’un neveu de Vincent Lambert, favorable à sa fin de vie. Il fustige la stratégie des parents qui transforment les médecins et les juges en ennemis s’ils ne vont pas dans leur sens. « Vous êtes devenus des parties, dit l’avocat au Tribunal. Vous êtes l’objet d’une mécanique qui veut montrer votre mauvaise foi, comme celle des experts. Vous devez mettre un terme à cette spirale infernale. Tranchez en tant que juge et appliquez la loi ! »
Le jugement est annoncé dans une dizaine de jours. Mais les parents promettent un recours devant le Conseil d’Etat s’il ne va pas dans leur sens.
