C’est un mal dont ont souffert beaucoup de villes reconstruites, selon Catherine Coutant. Conseillère municipale déléguée à la politique patrimoniale de Reims, elle explique que les villes détruites par les guerres se sont relevées dans l’urgence, sans plus se soucier par la suite de préserver le patrimoine de leur renaissance. C’est peut-être ce qui explique que le Plan Local d’Urbanisme de Reims(PLU) n’était jusqu’ici, pas très protecteur. Ainsi la vilLe n’aurait-elle pas eu la possibilité de s’opposer, par exemple, au programme immobilier qui a vu la démolition d’un joyau de la reconstruction de Reims, au 25 rue des Élus, démolition par ailleurs validée par l’architecte des bâtiments de France. Idem pour cette façade très audacieusement réinterprétée, rue du Barbâtre, et d’autant plus surprenante qu’elle se situe dans le périmètre de la Cathédrale, à quelques pas de la Bibliothèque Carnegie.Mais une page est peut-être en train de se tourner.
« Aujourd’hui, cent ans après la guerre de 14, dit encore Catherine Coutant,on arrive au bon moment pour valoriser ce qui a été fait à la reconstruction. » Bien avant l’arrivée de la nouvelle équipe municipale, l’architecte et urbaniste Olivier Rigaud avait recensé les maisons remarquables de sa ville. Dans ce sillage, Catherine Coutant a souhaité établir un état des lieux, aussi exhaustif que possible, de tout ce qui peut présenter un intérêt patrimonial : les bâtiments, mais aussi les cours et les jardins, les caves et les greniers, dans le cœur de la ville et dans ses quartiers. C’est ainsi qu’un certains nombres de maisons ont été rajoutées au PLU pour les protéger. La création d’un premier Site Patrimonial Remarquable (SPR) autour de la Butte Saint Nicaise renforce cette démarche fixant un cadre juridique pour la protection des espaces notamment autour des sites classés par l’UNESCO à Reims (la Cathédrale et a Butte Saint Nicaise). L’ État, la Ville et la Région déterminent avec un cabinet extérieur un périmètre qui recense tous les points d’intérêts. « Ce dispositif va plus loin que le PLU commente Catherine Coutant. Maintenant pour chaque permis de construire on se met autour d’une table avec la présidente du Grand Reims, le maire et le directeur de l’urbanisme, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. Ça ne veut pas dire que tout sera bloqué. Lyon et Bordeaux sont des références en la matière et ils ont su démolir quand il le fallait. »
Reims est entrée au classement des Villes d’Art et d’Histoire en 1987. « Aujourd’hui on veut valoriser son patrimoine en rappelant que c’est une ville qui a accompagné l’histoire de France. La porte de Mars, le Cryptoportique, la Cathédrale, Saint Rémi… » L’antiquité , le Moyen Âge, les guerres, la reconstruction, et la ville d’aujourd’hui devront donc se raconter dans une seule et même grande histoire. «L’idée est de travailler en même temps sur l’environnement de ce qui est restauré. On le fera pour Saint Rémi – un budget de 42 millions- en valorisant les abords de la basilique, mais aussi pour la Porte Mars qui vient d’être sauvée. Comme on l’a fait pour Saint Maurice avec la volonté d’harmoniser la place Museaux et la magnifique restauration de Sciences PO. » Ce qui est encourageant c’est que la Mission Mecennat, lancée par la précédente municipalité, a suscité un engagement très fort des rémois. Il veulent être les mécènes de leur ville comme en attestent leurs souscriptions pour la Fontaine Subé, la Porte de Mars, le Luchrone, et tout récemment l’église Saint–Maurice.