Le tueur en série Michel Fourniret était son mari. Il est mort en 2021. Ils ont été jugés ensemble pour 8 crimes abjects qu’elle a accompagnés avec zèle. Elle est seule cette fois dans le box des accusés pour répondre de sa complicité dans trois autres enlèvements, le plus récent étant celui d’Estelle Mouzin. Michel Fourniret les a commis dans l’intention de violer ses victimes avant de les tuer…une habitude. Monique Olivier est déjà condamnée à perpétuité. Ce procès n’aura aucune incidence sur sa détention.
On sait depuis peu qu’Estelle Mouzin, si longtemps recherchée par sa famille, a été enlevée à Guermantes par Michel Fourniret en Janvier 2003. Elle avait 9 ans. Joanna Parrish, une jeune répétitrice anglaise, a été enlevée avant d’être violée et étranglée dans l’Yonne en 1990. Marie Angèle Domece avait 20 ans quand elle été enlevée et tuée après une tentative de viol à Auxerre, en 1988. Avant d’entendre Monique Olivier sur ces faits, le président a longuement tenté de sonder sa personnalité. Mais le mystère demeure.
D’ACCORD SUR TOUT
A l’ouverture de son procès devant la Cour d’Assises des Hauts de Seine, Monique Olivier s’est laissé photographier dans la plus totale acceptation. Elle n’avait aucune obligation d’autoriser cette mise au pilori. Elle l’a acceptée parce qu’elle est convaincue, comme elle le précise à la Cour, que les journalistes auraient trouvé le moyen de lui voler son image si elle s’était refusée à ce mitraillage. Elle reconnaît par ailleurs absolument tous les faits qui lui valent d’être jugée à Nanterre. Le président en fait une synthèse assez sobre et pourtant difficilement audible. « Je regrette tout ce qui s’est passé dit Monique livrer. Quand j’entends ça, ça me…». Est-ce l’émotion qui l’empêche de finir sa phrase ?
JUSQU’À CAUTIONNER LE PIRE
Car c’est bien elle, Monique Olivier, qui à deux mois de la naissance de son fils Sélim, fait monter Joanna Parrish a bord de la camionnette qu’elle conduit seule en ce jour de Mai 1990. Un peu plus loin, elle charge un homme à la recherche d’une station service, jerricane à la main. Et la camionnette repart, pour s’arrêter en rase campagne. Les portes arrière sont verrouillées, comme toujours. Elle reste au volant, sans broncher pendant qu’à l’arrière son mari massacre Joanna Parrish, dénudée, ligotée et violée alors qu’elle a déjà perdu connaissance. Clouée sur son siège, elle le voit s’éloigner en portant la jeune fille à bout de bras. Il lui dira qu’il l’a déposée dans un cours d’eau. Comment admettre qu’elle soit bouleversée par la violence dont elle est témoin, sans lever le petit doigt pour l’empêcher ?
UN PARADOXE ABSOLU
Mais c’est bien à Monique Olivier qu’on doit la révélation de ce crime de Michel Fourniret. Tout comme l’enlèvement de Marie Angèle Domece deux ans plus tôt. Elle explique qu’il est obsédé par ce « beau petit sujet ». Cette fois, Michel Fourniret s’isole avec sa proie. Il revient en portant son cadavre dans les bras. Il le charge dans le coffre et le couple rentre chez lui, à Saint-Cyr-les-Colons. Le corps ne sera jamais retrouvé. Ces deux crimes, jugés à Nanterre , s’ajoutent à 7 autres rapts très similaires, jugés à Charleville en 2008, après les aveux terrifiants de Monique Olivier, en 2004. Ils sont distillés par Monique Olivier dans les locaux de la police de Dinan. Michel Fourniret est détenu en Belgique depuis un an pour l’enlèvement raté d’une adolescente à Ciney. Les enquêteurs sont convaincus de la culpabilité de Michel Fourniret dans des crimes sexuels bien plus graves, sans en avoir la preuve.
MERCI DOCTEUR !
Les 120 auditions de Monique Olivier sont conduites par la police belge avec infiniment de tact et de patience. Elle finit par leur faire un récit qui dépasse tout ce qu’ils pouvaient imaginer. L’enquêtrice Catherine Bauret s’exprime à la barre avec une modération qui cache mal le traumatisme de cet épisode marquant de sa carrière Elle se souvient de cet étonnant contraste, chez Monique Olivier, capable d’enchaîner sur les petits riens de la vie quotidienne après les pires horreurs, avec une facilité déconcertante. Elle disait avoir été d’une complaisance totale avec Michel Fourniret pour qu’il ne l’abandonne pas, mais elle avait aussi peur de lui. Sans sa parole, Michel Fourniret serait sorti de prison, ce qu’ elle ne souhaitait pas. Ses aveux ont été distillés d’abord, ils sont allés crescendo, jusqu’à la révélation incontournable de son implication. « Après avoir libéré sa conscience elle nous a lâché un «merci docteur», et c’est le seul moment où nous avons un peu ri »
VINGT ANS TROP TARD
La Cour d’Assises de Nanterre condamnera Monique Olivier. Mais ce procès est aussi celui des erreurs et manquements des magistrats et de la police, maintes fois pointés à l’audience par les avocats de la partie civile, Corinne Herman et Didier Seban. Les familles Domece et Parrish savent depuis 20 ans que le calvaire de leur fille est attribué à Michel Fourniret…20 ans avant que la justice ne passe. La disparition d’Estelle Mouzin aurait pu être évitée, insiste encore Maitre Seban, si la surveillance de Michel Fourniret avait été efficace à sa libération, après une condamnation pour des crimes sexuels. La déposition de Sabine Kheris, la magistrate aujourd’hui en charge du pôle cold case de Nanterre est très attendue. Son opiniâtreté et son savoir-faire ont finalement permis d’élucider le mystère de la disparition de la fillette de Guermantes. On aurait pu l’attribuer à Michel Fourniret dès 2004