LE DESTIN D’UN COUPLE D’ÉTUDIANTS FAUCHÉ PAR LE MAL ABSOLU

Elle a 20 ans, il en avait 19. Les deux jeunes gens se sont arrêtés par hasard sur un parking à Courville pour organiser la soirée qu’ils allaient passer ensemble. Mais Rudy Carlin est passé par là. A bord d’une Audi volée il s’est garé prés de leur voiture. Il cherchait du shit et une fille. Armé d’un fusil il a tiré sur le garçon. Puis il a enfermé la jeune fille dans son coffre. Quelques heures plus tard il l’a violée plusieurs fois malgré ses suppliques.

Avant de tuer et de violer, Rudy Carlin a eu le temps de beaucoup fréquenter les tribunaux et les geôles. Ce rémois de 41 ans a été condamné à 27 reprises entre 1998 et 2018. Ce qui lui a valu de passer plus de la moitié de sa vie en prison . Habitué des délits routiers, des vols et des violences, il avait fini de purger sa dernière peine de deux ans d’emprisonnement en mars 2020. Célibataire sans travail et sans véritabe domicile fixe, il avait un problème de drogue. Victime de violence familiales, placé en foyer à 12 ans, il consommait quotidiennement du cannabis depuis ses 13 ans, il était sous subutex depuis qu’il en avait 20.

UN DÉLINQUANT D’HABITUDE

Comme le précise Matthieu Bourrette, le Procureur de la République de Reims, il n’était sous le coup d’aucun sursis, ne faisait l’objet d’aucun suivi judiciaire. Ce soir du 27 mai, il a donc le droit de vivre en homme libre. Mais il s’arme d’un fusil pour rouler à bord d’une AUDI volée. Il s’arrête sur un parking à Courville, juste à côté d’une Golf dans laquelle deux étudiants se demandent tranquillement où ils vont aller finir leur soirée. Rudy Carlin les interrompt, fusil au poing. Il cherche de la drogue. Le jeune homme tente de remettre la voiture en route pour prendre la fuite. En vain. Rudy Carlin le fait sortir. Et il tire à deux reprises. Le garçon s’effondre. L’autopsie établira que sa mort est due à un seul coup de feu tiré à moins d’un mètre dans l’abdomen. La jeune fille est enfermée dans le coffre.

JUSQU’AU PETIT MATIN

Elle a toujours son portable sur elle. Elle appelle les pompiers et sa mère. Il s’en aperçoit, s’arrête et lance le téléphone le plus loin possible. Puis il fait asseoir sa prisonnière  à l’arrière de la voiture, genoux et mains liés. Et il reprend la route en menaçant plusieurs fois de la violer. Suit un périple interminable qui doit lui permettre de voler de l’essence à une pompe. Faisant preuve d’un sang froid remarquable, l’étudiante le fait parler pour créer une diversion. Il lui raconte sa vie en famille et en prison, ou sa vie amoureuse. Elle invoque sa jeunesse, le risque de grossesse pour le dissuader d’aller au bout de ses intentions. Mais rien ne l’arrêtera. Il a beaucoup bu, sans doute a-t-il aussi consommé pas mal de drogue, des joints… du subutex… c’est ce qu’elle comprend. Elle tente de le convaincre de la déposer à Fismes. Mais il la viole à plusieurs reprises.

LA LOGIQUE DU PIRE, OU DE L’ABSURDE

Il lui explique qu’il se sent obligé de la violer “parce qu’il n’a pas tiré sur son copain pour rien”. Il est 6 heures du matin. Elle le persuade de la libérer. Il la laisse à un rond-point, ignorant manifestement que la gendarmerie de Gueux est à quelques centaines de mètres. Elle s’y rend aussitôt. La veille il lui avait étrangement donné son propre téléphone pour qu’elle rassure sa mère. Ce qui a permis aux gendarmes de la Section de Recherche de Reims d’identifier sa ligne, de surveiller ses relations. Son interpellation a eu lieu le soir même avec l’appui du GIGN chez une de ses amies. Rudy Carlin a tout reconnu sauf l’intention homicide.

GENTIL ET MÉCHANT

Pas de regrets, ni de pleurs, ni d’inquiétude pour ses victimes, indique encore le Procureur. Il explique qu’il a tiré une première fois pour impressionner sa victime, et une deuxième fois dans le ventre, pour la neutraliser . Il pensait qu’on viendrait rapidement à son secours. La jeune fille a été libérée quand il a eu ce qu’il voulait.
Il justifie le viol parce que “dans sa tête » Il n’était « pas question d’avoir tiré pour rien. » Il se qualifie de “dingue, gentil et méchant”, dit qu’il a pensé à se rendre, qu’”il se dégoûte”, qu’il réalise la gravité des faits,”tout ça pour un rapport de merde”.

Rudy Carlin encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

 

Monique Derrien

Reporter puis grand reporter à Radio France de 1987 à 2016. Prix du Grand Reportage de Radio France. Chronique judiciaire régulière et assidue des petits et grands procés : Chanal, Heaulme, Fourniret. Attention soutenue sur les audiences et faits de société et sur la politique, un peu. Parce qu'ils disent presque tout du monde qui nous entoure. Intérêt marqué pour la culture, la gastronomie et le champagne. Celui qui se boit et celui qui a su si bien se vendre jusqu'ici.

You May Also Like