L’ex épouse de Michel Fourniret est attendue une fois encore, ce 9 Octobre, dans le bureau de la juge Sabine Kheris au Palais de justice de Paris. Les précédents échanges entre la magistrate et Monique Olivier ont été à ce point fructueux qu’ils ont conduit Michel Fourniret à avouer l’assassinat d’Estelle Mouzin en mars dernier, 17 ans après la disparition de la fillette dont le corps n’a toujours pas été retrouvé. Car tout n’a pas été révélé, loin de là.
L’union de Monique Olivier avec Michel Fourniret s’est construite sur un pacte diabolique en 1985. Elle s’engageait à lui fournir des vierges, et il allait en contrepartie la venger des mauvais traitements que lui avait infligé un précédent mari.
(Lire par ailleurs : http://www.moniquederrien.com/une-union-scellee-par-le-crime/ ). Voilà l’invraisemblable genèse d’une des plus terrifiantes affaire de l’histoire criminelle française. LesFourniret ont donc impunément sévi pendant plus de 20 ans jusqu’à l’arrestation de Michel Fourniret à la suite de l’enlèvement raté de la jeune Marie en 2004. Le premier procès du couple s’est tenu devant les Assises des Ardennes en 2008 pour 7 crimes à caractère sexuels dans lesquelles Monique Olivier a souvent été la complice de son mari. Ils ont été condamnés l’un et l’autre à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une peine de sûreté de 28 ans pour elle, tandis que la perpétuité incompressible prononcée pour Michel Fourniret signifie qu’il ne devrait plus jamais sortir de prison.
ELLE DÉNONCE, IL AVOUE
On oublie souvent que c’est le récit de Monique Olivier qui a permis la progression des enquêteurs belges puis français dans un dédale criminel dont la révélation en 2004 a fait l’effet d’une bombe. Et si l’ombre des disparitions de Joanna Parrish en Mai 90, et de Marie Angèle Domece dix ans plus tôt, planaient déjà sur le procès de Charleville c’est que Monique Olivier avait révélé ces deux crimes dès ses premières auditions. Mais elle s’était rétractée, a expliqué son avocat Richard Delgenes, en raison de la brutalité du procureur ardennais qui la rencontrait alors. En 2018, le couple a enfin été mis en examen dans ces deux dossiers instruits par la juge Kheris. Et c’est peu dire que les méthodes de la magistrate parisienne sont plus adaptées à la psychologie de Monique Olivier : en Novembre dernier elle a anéanti l’alibi de son ex mari dans la disparition d’Estelle Mouzin et il a fini par avouer, sans pour autant faire avancer les recherches du corps de la fillette.
DES SIGNES D’HUMANITÉ
Le savoir faire de la juge n’explique pas tout dans l’évolution de ce dossier. En Novembre 2018 le couple a été jugé devant les Assises de l’Essonne pour l’assassinat, crapuleux cette fois, de Farida Hammiche.
(Lire par ailleurs : http://www.moniquederrien.com/fourniret-a-aussi-etrangle-farida-et-combien-dautres/). Michel Fourniret, aujourd’hui âgé de 78 ans, y est apparu tel qu’en lui même, assumant ses crimes avec arrogance et mépris malgré l’Alzheimer débutant diagnostiqué par le psychiatre qui l’avait expertisé peu avant l’audience. Pas facile dans ces conditions de faire la part des choses entre ses talents éprouvés de manipulateur et ses vraies pertes de mémoires. Devants le jury versaillais, Monique Olivier par contre, n’était plus tout à fait celle qu’on a découverte avec sidération au procès de Charleville. Elle était capable cette fois d’exprimer sa compassion à la famille Hammiche, regrettant de ne pouvoir la renseigner sur la sépulture de Farida.
RIEN N’EST IMPOSSIBLE
Au centre pénitentiaire de Rennes Monique Olivier, très isolée, participe au dressage de chiens d’aveugles. A 72 ans elle n’attendrait plus rien des années qui lui restent à vivre selon son avocat Richard Delgenes. Pourtant, rien n’interdit d’envisager sa mise en liberté de au terme de sa peine de sûreté. Et tout ce qui lui reste à dire pourrait, en attendant, soulager sa conscience. La fameuse période blanche de 1990 à 2000, au cours de laquelle Fourniret n’aurait pas sévi, est totalement improbable pour les experts en criminologie. Monique Olivier qui l’a vu vivre pendant ces dix années, n’a jamais dit le contraire. La disparition en 1993 de Lydie Logé à 29 ans, vient d’ailleurs d’être jointe aux dossiers dont Sabine Kheris est en charge. Et même si la justice française ne prévoit aucune contrepartie pour celui qui dénonce, l’approche de la magistrate parisienne a fait la preuve de son efficacité. En Août dernier encore elle avait choisi de rendre tout son temps, presque une semaine pour l’écouter. Mais dès le troisième jour de l’audition de Monique Olivier, son avocat a indiqué qu’elle était mise en examen pour complicité dans le dossier d’Estelle Mouzin. L’ex épouse de Michel Fourniret a confirmé qu’il avait bien enlevé la fillette avant de la violer et de l’étrangler à Ville-sur-Lumes, dans les Ardennes. RIchard Delgenes a par ailleurs précisé que de l’ADN partiel de la fillette avait été retrouvé sur un matelas saisi dans la maison de la sœur de Michel Fourniret, maison qu’il occupait alors à Villes-sur-Lumes. Les fouilles déjà entreprises à cet endroit en Juin 2020 avaient été infructueuses. La nouvelle audition de Monique Olivier, ce 9 Novembre 2020, orientera peut-être les enquêteurs vers d’autres recherches. Désormais mise en examen dans le dossier Mouzin, l’ex épouse de Fourniret n’aurait rien à perdre en révélant ce qu’elle n’a peut-être pas encore dit.