Après avoir été un garçon de bonne famille, ce quadragénaire pourrait être un homme «bien sous tout rapport». Son activité commerciale prospère lui vaut d’approvisionner les meilleurs restaurants de Reims et des environs. Mais son addiction persistante à la cocaïne lui joue de mauvais tours… cette fois jusqu’à prostituer une mineure en Juin dernier.
Il est toxicomane depuis l’adolescence, et les 11 mentions qui figurent déjà à son casier judiciaire sont le plus souvent liées à son addiction… Le tribunal correctionnel de Reims vient de condamner ce père de famille, une fois de plus : 9 mois d’emprisonnement dont 3 fermes pour prostitution d’une mineure et usage de stupéfiants.
UNE QUÊTE DE TOUTE PUISSANCE
La dépendance du prévenu se perçoit dès ses premieres paroles. L’élocution n’est pas claire, le raisonnement difficile à suivre. Son égo surdimensionné et sa mythomanie se manifestent pourtant dans l’intonation, autant que dans les mots. Il a même expliqué aux enquêteurs que cette histoire était un complot de ses concurrents pour le mettre en difficulté. Il le répète à la barre sans craindre le ridicule, au point que son avocat, Mourad Benkoussa, le supplie de se taire. Sa défense consiste à tout nier en bloc : il a fait appel à une prostituée parce que sa petite amie du moment venait de le quitter. Il ne voulait pas rester seul. ll avait besoin de compagnie. Ils ont bu et consommé de la drogue, il veut bien l’admettre. Ils ont parlé, c’est tout. Il ne savait pas qu’elle était mineure et il jure qu’il ne l’a pas touchée. D’ailleurs les femmes qu’il recherche sont toujours plus âgées que lui, et il les aime plutôt bien en chair alors qu’elle a la peau sur les os. Donc vraiment, rien ne va dans cette histoire. «C’est un tissu de conneries.»
UN COMPORTEMENT IRRESPONSABLE
Impossible de contester, pourtant, qu’une adolescente ne pouvant vraiment pas passer pour majeure, a été déposée chez lui autour de 3 heures du matin, moyennant une somme de 500 euros. L’exploitation des écoutes téléphoniques, et de la balise qui équipe la voiture des proxénètes de Shana* ne laissent pas de place au déni. C’est d’ailleurs eux qui se sont inquiétés quand elle a fini par les joindre au téléphone. Ils ont compris à sa voix, qu’elle n’était pas dans un état normal. Ils ont eu peur que cette nuit s’achève dans un drame. Ils sont revenus la chercher une première fois, mais il est descendu leur dire qu’elle était déja partie. Shana* se terrait dans une autre pièce, nue sous la veste qui couvrait ses épaules. L’inconscience et la désinvolture du prévenu ne font aucun doute. Il était attendu ce jour là à un anniversaire. Mais après plusieurs coups de fil sans réponse, son ex compagne finit par venir le chercher. Ils sont séparés, mais ils restent proches. Leurs deux filles sont dans la voiture.
3 MOIS DE PLUS
Tout le monde se met donc en route pour un déjeuner très conventionnel en famille…et Shana* reste seule. «Il lui a fait prendre un truc » s’inquiète encore un de ses proxénètes après un nouvel appel. Ils reviennent sur les lieux. “Ce jour là ils ont ont vraiment eu très peur” dit son avocate. Shana* est la grande absente de ce procès. “Au début elle a voulu cacher sa prostitution parce qu’elle avait peur” ajoute Maitre Braconnier. Elle ne savait pas qu’elle risquait peu, contrairement à ses proxénètes. “Votre décision est importante dit la procureure au tribunal, parce qu’il faut dire que ces victimes vulnérables ne doivent pas tout subir et que l’argent ne paie pas tout.” Elle demande un an ferme. Le tribunal écarte le délit de séquestration : les portes et fenêtres de la villa n’étaient pas vérouillées. Mais il prononce une peine de 3 mois d’emprisonnement pour consommation de drogue et prostitution d’une mineure. Elle pourra s’exécuter sous bracelet électronique. L’obligation de soins est évidemment l’autre exigence des juges. Faut-il y croire ?
*Prénom modifié