L’arrêt de la Cour d’Appel de Reims conforte presque à l’identique le jugement du Tribunal Correctionnel. Le brigadier jugé en même temps que les deux policier est donc relaxé comme en première instance.
Pourtant le récit des faits qui se sont déroulés sous ses yeux sans qu’il tente de les empêcher n’était pas moins insoutenable à Reims qu’il y a dix huit mois à Châlons-en-Champagne. Cet homme a donc impunément assisté au menottage de la jeune auxiliaire de sécurité par ses collègues, a son enfermement contre son gré dans la geôle des gardes à vue. Il a même filmé la scène qui voulait être drôle sur son portable avant d’envoyer la vidéo à la victime… puisqu’il s’agissait d’une blague habituelle entre policiers. C’est en tous cas ce que les prévenus ont fait valoir à la barre.
« UN HUMOUR DE BRIGADE »
Cet épisode est intervenu après des brimades répétées, des humiliations de plus en plus lourdes sur celle qu’on a surnommée “la grosse” dès son arrivée au commissariat. Elle voulait absolument être intégrée, alors elle a tout accepté, les écussons et les galons arrachés, les seaux d’eau sur la tête, le chewing gum et les crachats dans les cheveux, les claques sur les fesses, les coups de règle, les insultes salaces jusqu’à cette suggestion faite au gardé à vue qui se trouvait là : “elle aime la sodomie, tu peux y aller “. Devant la Cour la jeune mère de famille explique aux juges qu’elle était très complexée par son poids et qu’elle faisait semblant de rire au début pour intégrer le groupe. Et puis elle a fini par les fuir, s’isolant dans les toilettes pour prendre ses repas. Sa première tentative de suicide a été déjouée par son mari, mais l’idée de la mort était toujours là.
UNE PAROLE LIBÉRATRICE
Elle s’en est ouverte à celui de ses collègues qui lui témoignait de la bienveillance. Et tout est allé très vite. On l’a désarmée par sécurité, une autre humiliation, et un peu plus tard elle a fini par accepter de raconter ce qu’elle avait enduré. Ses harceleurs ont été suspendus sur le champ. Ils se défendent à l’audience en revendiquant “un humour cru, un humour de brigade”. “On ne pensait pas lui faire de mal”. “Elle riait avec nous.” La jeune femme poursuit aujourd’hui un parcours professionnel beaucoup plus serein à Saint Dizier, même si elle regrette que son supérieur châlonnais ne soit pas inquiété par la justice. Ses anciens collègues annoncent qu’ils se pourvoient en cassation. Mais les deux policiers et le brigadier devront d’ici là passer devant une commission de discipline qui pourrait leur infliger des sanctions sévères.