La peine de Jean-Louis et Marie-Jeanne Martin passe de trois à six mois de prison avec sursis pour dénonciation calomnieuse du père François Jérôme Leroy, le prêtre du Foyer de la Charité de Baye qu’ils soupçonnaient de pédophilie. La Cour d’Appel de Reims alloue par ailleurs un préjudice de 5000 euros au religieux. Les prevenus estimaient pourtant n’avoir fait que leur devoir en exprimant leurs doutes auprès de l’évêque et du procureur de Châlons-en-Champagne.
Les époux Martin ont quitté Dijon pour s’installer à Baye, dans la Marne, il y a 6 ans. Catholiques fervents, ils souhaitaient prendre leur retraite à la campagne et à proximité d’une communauté religieuse, dans le but de vivre pleinement leur foi. Ils se sont renseignés auprès de plusieurs monastères et c’est ainsi qu’ils sont finalement venus s’installer en pleine nature, dans une maison qui leur est louée par le Foyer de la Charité de Baye, à l’écart de ce village de 400 habitants. Mais les rapports entre les locataires et le propriétaire, représenté par le Père Leroy, se sont vite dégradés.
RIGIDES OU REVENCHARDS ?
Les Martin réclamaient des travaux qui n’arrivaient pas et c’est dans ce contexte conflictuel qu’ils rédigent une lettre dans laquelle il est fait état de pratiques pédophiles au Foyer de la Charité de Baye. Les premières dérives sont attribuées au père Michel Blard décédé en 2014, et décrit comme un « prédateur connu mais protégé ». Une enquête sur ses mœurs est d’ailleurs en cours, même si les poursuite son éteintes par son décès. Reste que le Père Leroy qui lui a succédé n’est pas épargné par le courriel des Martin. Ils le présentent comme « un manipulateur narcissique enjoué et diabolique » à la fois. Les auteurs expriment ainsi leur craintes à « chaque fois que leurs petits-enfants empruntent le chemin qui les sépare de la Charité de Baye ».
Mais l’angoisse serait montée d’un cran quand le Père Leroy s’est permis de faire une photo des deux adolescents. En manteau et bonnet, certes, mais sans l’autorisation des grands parents. A quoi s’est ajoutée une proposition faite à l’aîné d’entre eux de venir réparer un vélo au domicile du prêtre. « J’étais conscient que je faisais une gaffe, avait commenté le religieux devant le tribunal Correctionnel de Châlons-en-Champagne , mais j’espérais naïvement améliorer nos relations. » Toujours est-il qu’un an plus tard devant leurs juges les grands parents restaient scandalisés par cette invitation. Il faut dire qu’une famille du village leur aurait confié, sous le sceau du secret, que leur fils était à jamais traumatisé par les gestes déplacés du prêtre. L’enquête révélera que le jeune homme avait en réalité peu apprécié le rituel du lavement des pieds qu’on lui avait proposé, sans plus.
SIGNALEMENT OU DÉNONCIATION ?
« Les faits dénoncés sont un tissu de mensonge avait asséné le procureur en première instance . Et il y a bien eu intention de nuire de la part de personnes qui n’existent que par le conflit en se dissimulant derrière un pseudo statut de lanceur d’alerte. » Aucune des multiples investigations et auditions menées par la brigade de recherche de la gendarmerie d’Epernay n’a permis de retenir la moindre charge contre le père Leroy. Il avait pourtant été éloigné de Baye par l’évêque de Châlons-en-Champagne dès réception du courriel des Martin. Et c’est aussi Monseigneur François Touvet qui a choisi de communiquer sur ce signalement en le relayant sur Facebook. Il faut dire que Monseigneur Barbarin faisait alors l’objet d’une enquête pour non dénonciation de pédophilie. « Vous êtes plus responsables que les Martin s’il y a eu calomnie » avait lancé l’avocat de la défense, à l’évêque. Les Martin ont-ils été vigilants ou dénonciateurs ? Ils martèlent qu’ils n’ont fait que demander de l’aide à une Eglise qui ne les aurait pas entendus. Mais la Cour d’Appel ne les a pas suivis. Leur peine de 3 mois de prison avec sursis est doublée, ils devront verser 5000 Euros au prêtre en réparation de son préjudice, et 1200 euros au titre des frais et le jugement sera affiché en Mairie de Baye durant 3 mois. Dans son arrêt rendu publiquement le 4 Septembre dernier, la Cour indique que « l’acharnement et la mauvaise foi des épous Martin , persistant aprés la décision de première instance et encore à l’audience devant la Cour d’Appel, à décrier la partie civile, ont prolongé et accru le préjudice moral subi par François Jérôme Leroy. Maître Chevais, l’avocat du couple, indique qu’il n’y aura pas de pourvoi en cassation.