Avec 325,5 millions de bouteilles vendues en 2022, la Champagne vient de vivre une troisième année record. Pour Christine Sevillano, la présidente de la *Fédération des Vignerons Indépendants de Champagne, c’est l’occasion ou jamais de produire davantage de bouteilles, plutôt que de vendre son raisin aux négociants. Autrement dit de se “désengager”.
Cette incitation à se désengager du négoce a constitué un des messages forts de la récente Assemblée Générale de la Fédération. Car certains de ses 403 adhérents ont pu être tentés jusqu’ici de réduire leurs volumes de production.
OSER SE DÉSENGAGER
Il est vrai que l’élaboration, la commercialisation et l’exportation de leurs propres bouteilles demandent des efforts aux vignerons. Alors qu’il est beaucoup plus simple de livrer son raisin, grassement payé par le négoce. Mais la consommation du champagne évolue, elle séduit de nouveaux clients. Contre toute attente, la pandémie a modifié et développé la consommation de champagne. Au point que les cavistes et les importateurs ont du mal à s’approvisionner. Philippe Launois, qui copréside le Syndicat des Courtiers en Vins de Champagne confirme que la demande du négoce en raisin est particulièrement soutenue. « Je n’ai jamais vu ça en 15 ans d’exercice ». La progression espérée des approvisionnements se situe entre 3,5 et 10% aux prochaines vendanges. Mais le défi sera plutôt de maintenir les transactions au niveau actuel. L’opportunité de placer leurs bouteilles existe donc bel et bien pour les producteurs. Elle leur permettrait de conquérir les parts de marché qu’ils ont pu perdre.
VIGNERONS ET ENTREPRENEURS
Pour Christine Sevillano, c’est une chance qu’il faut saisir. Parce qu’un engagement trop fort auprès du négoce peut-être synonyme de dépendance pour les vignerons. Elle encourage donc ses troupes à se comporter en décideurs. C’est l’occasion de rappeler que la Fédération qu’elle dirige s’est prononcée pour un rendement à 11 000 kilos sur 5 ans, sans effet yoyo d’une année sur l’autre. Parce que c’est la seule façon, pour le vigneron-entrepreneur de construire des plans de trésorerie stables. La présidente de la fédération des indépendants rappelle aussi la vocation première de la réserve individuelle. Ce stock de vins tranquilles est mis de côté quand la récolte est bonne en prévision des années moins fates. Il doit rester la roue de secours des aléas climatiques. Il faudrait donc éviter d’en faire une variable d’ajustement économique. Les journées de formation programmées au mois de Juin prochain par la fédération sont dans la même logique entrepreneuriale. Elles seront dédiées au développement de l’oenotourisme sur les exploitations, à l’exportation, avec un programme spécialement dédié aux primo-exportants.
*La Fédération des Vignerons indépendants de Champagne compte 403 adhérents sur 16 200 vignerons. ls commercialisent plus de 16 millions de bouteilles qu’il produisent de A à Z
